Cet article porte sur l'application du principe 5 du modèle de Toyota dans le secteur de la construction.
Cet article est le cinquième épisode de notre série explorant les 14 principes de Toyota et les appliquant au secteur de la construction.
Ces principes ont été identifiés et développés dans le livre « Le modèle Toyota » de Jeffrey Liker. Le 5ème principe est le suivant : La standardisation des processus est le fondement de l’amélioration continue
Présentation du principe
Jeffrey Liker identifie quatre types d’entreprises, parmi lesquels la bureaucratie habilitante (dont Toyota fait partie) se démarque. Dans ce modèle, les employés sont responsabilisés et soutenus par des règles et des standards.
Un standard est une méthode simple, claire, documentée et éprouvée expliquant comment accomplir une tâche précise.
Voici ce qu’apporte les standards à l’entreprise qui les utilise :
- La réduction des variations : le standard permet de minimiser les fluctuations dans les processus de production. La durée d’une tâche est donc similaire d’un employé à l’autre.
- L’augmentation de la productivité : le standard présente la manière la plus efficace d’effectuer une tâche.
- Le développement des compétences des équipes : les standards servent de guide aux nouveaux arrivants mais également aux équipes en place. Elles ont accès aux bonnes pratiques concernant les activités à réaliser.
- Une communication efficace : les standards permettent une communication facilité entre les employés qui utilisent un vocabulaire commun. De plus, les équipes comprennent plus facilement ce qui est attendu d’elles, les objectifs à atteindre.
- Une identification facilitée des actions d’amélioration : il est important de noter que les standards ne sont pas des directives imposées mais permettent de faciliter le travail des équipes et la mise en place d’une démarche d’amélioration continue. En effet, ils permettent d’identifier les écarts par rapport aux règles établies. En cas d’écart, des actions sont mises en œuvre pour les réduire donc optimiser les processus et augmenter l’efficacité de l’entreprise. C’est ce qu’on appelle une démarche d’amélioration continue.
Dans les entreprises du secteur de la construction, il apparaît que les standards sont peu utilisés mais peuvent répondre à différents enjeux.
Les défis du secteur de la construction
Voici les défis qui complexifient l’utilisation de standard et la mise en place d’une démarche d’amélioration continue :
- Variabilité des sites : Les conditions sur site peuvent varier considérablement d’un projet à l’autre, ce qui rend difficile la création de standards qui fonctionnent dans toutes les situations. Par exemple, les caractéristiques du sol, les conditions météorologiques et les réglementations peuvent varier et affecter les processus de construction. Pour s’adapter à ces différents cas, plusieurs standards doivent être crées, ce qui complexifie leur généralisation.
- Multiplicité des intervenants : Dans les projets de construction, il est fréquent que plusieurs entreprises interviennent. Pour qu’une démarche d’amélioration continue soit efficace, il faut que tous les acteurs présents y participent. Il est cependant difficile de forcer des entreprises à mettre en place des standards et des actions d’amélioration si cela ne fait partie de leur culture.
- Des délais difficiles à respecter : De manière générale, il est difficile pour les entreprises de respecter les échéances d’un chantier (à cause des aléas, de la dépendance avec les sous-traitants, les fournisseurs, … les articles précédents développent ces défis). De plus, la multiplicité des problèmes du quotidien pousse les managers à se concentrer sur les activités au jour le jour, les empêchant de mettre en place des changements structurels au sein de l’entreprise (création et mises à jour de standards). Bien que l’amélioration continue des processus permette des gains de temps, sa mise en place requiert une période de formation et de création des standards qui peut être difficile à accepter.
- Culture traditionnelle : Dans beaucoup d’entreprises du secteur, les connaissances sont transmises à l’oral depuis toujours. Cela peut rendre difficile l’acceptation du changement et l’adoption de nouvelles pratiques.
- Main d’œuvre diversifiée : La présence d’intérimaires, de sous-traitants et de nouveau personnel (due à une forte rotation de la main d’œuvre) peut rendre difficile la formalisation des processus. Leur connaissance limitée de l’entreprise rend cette tâche plus complexe, même s’ils seraient les premiers à bénéficier de l’existence de ces standards.
L’application du principe au secteur de la construction
Malgré ces défis importants, ce principe reste pertinent dans le secteur du BTP. Voici quelques conseils pour le mettre en place :
- Communication et implication des équipes : Les équipes doivent être impliquées dès le lancement du projet de standardisation des processus. Leur participation active permet de définir avec eux la meilleure manière de faire (ce sont eux qui les utilisent) et de faire accepter ce changement de méthodes de travail et d’organisation (maintenant, tous les processus sont à standardiser).
- Analyse des processus existants : Afin de formaliser les processus, il faut les comprendre en allant sur le terrain, en observant les équipes et les différentes façons de procéder.
- Utilisation de ressources extérieures : Pour répondre aux problématiques présentées dans le défi « des délais difficiles à respecter », une solution peut être de travailler avec des consultants ou des employés du siège pour réaliser le suivi du projet de mise en place des standards et les formaliser. Cela permet de faire évoluer l’organisation malgré les problèmes terrains, la surcharge des équipes sur le chantier et de gagner du temps en bénéficiant de leur expertise.
- Formation succincte : La standardisation des processus n’est pas une fin en soi. Lorsqu’un processus a été standardisé, les équipes doivent y être formées rapidement afin d’harmoniser les pratiques. La formation doit être claire, succincte et facile à comprendre.
- Implémentation progressive : Pour intégrer cette nouvelle habitude, il est important de faire les choses petit à petit, pour ne pas bousculer les équipes et s’assurer que le travail effectué est efficace. Une manière de faire est de standardiser les processus progressivement. On analyse le processus, on identifie la meilleure manière de faire avec les équipes, on la formalise puis les équipes sont formées à ce processus avant de passer au suivant.
- Mise en place d’une démarche d’amélioration continue : Ces standards permettent d’identifier les écarts. Lorsqu’un standard n’est pas respecté, il faut se demander pourquoi et mettre en place des actions correctives. Cela peut passer par des ateliers de progrès avec les équipes terrains organisées régulièrement.
- Collaboration avec les différentes parties prenantes : Il est intéressant d’impliquer les intérimaires, les sous-traitants et mêmes les fournisseurs à cette démarche lorsque cela est possible.
- Récompense et reconnaissance : Les équipes doivent savoir que leur travail est remarqué pour renforcer leur motivation et leur implication dans la démarche.
Conclusion
En résumé, l’application du cinquième principe du système de production Toyota peut être facilitée par :
- Une communication et implication des équipes
- Une analyse efficace des processus existant
- L’utilisation de ressources externes au chantier
- Une formation succincte
- Une implémentation progressive
- L’identification des écarts
- Une collaboration renforcée avec les différents acteurs
- La récompense et reconnaissance des équipes
Retrouvez les articles sur la mise en place des quatre premiers principes du modèle Toyota dans le secteur de la construction sur les liens ci-dessous :